• Mariage arrangé page -10-

     

     Mariage arrangé 

     

    Après un temps réglementaire dans les grandes lessiveuses à bouillir qu'elles seules connaissaient, elles passaient les draps et le linge dans des baquets d’eau claire non chauffés, les draps séparés du reste du linge de coton pour ne pas les mélanger. Elles tournaient et retournaient encore les divers tissus et vêtements avant de pouvoir les sortir les un après les autres une fois qu’ils étaient assez refroidi pour les manipuler, les essorer puis, les charger dans une brouette de bois où l’on avait disposé un vieux morceau de drap sec et propre qui devaient recevoir le linge car il fallait encore aller à la rivière où se trouvait le lavoir. C'est là que toutes les femmes jeunes ou plus âgées que l'on appelait les lavandières, venaient taper les draps et tout ce qui était en coton. Le battoir était de rigueur : outil indispensable pour pouvoir battre la lessive à la rivière en contrebas où coulait une eau limpide, douce et fraîche. Le travail le plus harassant était de battre, battre et rebattre les tissus afin d'évacuer tout le savon. Tout ce labeur ne s'arrêtait pas là. Il fallait encore rincer abondamment le linge dans cette eau courante et chantante. Pour se donner du cœur à l'ouvrage, les lavandières chantaient mais ce n’était pas que fredonner des airs qu’elles avaient apprit de mères en filles ! Non ! C'était aussi des airs à la mode que les plus jeunes chantaient à tue tête, ce qui énervait passablement les vieilles paysannes. Robert se souvînt du temps ou il était encore jeune homme. Il connaissait tellement bien les habitudes des filles du pays. Il aurait préféré se marier avec une fille de la campagne. Les souvenirs lui revenaient par bribes. Il se revoyait en train de les espionner caché derrière les buissons jouxtant les abords de ce ruban d’eau vive qui serpentait à travers collines, monts et vallées. En cachette de son père, bien sûr ! Il grignotait quelques minutes de son temps sur le travail des champs pour admirer les beautés du village. Ho ! Il ne faisait rien de mal ! 

    Il aimait les voir laver le linge, et le taper avec leur battoir, bavarder, entonner les chants des lavandières, se trémousser en riant, un foulard retenant leurs cheveux d’on, parfois, s’échappait une mèche rebelle. Elles relevaient un coin de leur jupe longue qu’elles coinçaient entre leur fine taille, et leur ceinture de jupe. Elles avaient également une habitude qu’il aimait par dessus tout, c’était leur panier d’osier qu’elles calaient sur une de leurs hanches. Il sentait encore l’odeur des pains de savon dont elles se servaient, ce qui laissaient au linge une agréable odeur de fleurs des champs au pliage. Toute cette effervescence lui plaisait. Robert aimait aussi les voir se chamailler. Les vieilles étaient toujours en train de ronchonner : et ça rouspétait, rouspétait de plus belle, si bien qu'à la fin de la journée, au lavoir, entre les cancanières et les filles pleine de joie de vivre, tout le monde était épuisé. Lorsque les anciennes jugeaient que les draps et linge de maison étaient parfaitement propres, elles tordaient avec précaution chemises, robes, corsages, jupes et jupons, caleçon et pantalons en s'aidant mutuellement. Ensuite, elles allaient toutes ensembles étendre les draps en premier, dans les prés avoisinants faisant partie de leur domaine, ce qu'elles avaient si bien fait bouillir, rincé, lavé et tapé pendant les trois longs jours de grande lessive réglementaire. Rien ne valait les prés d’herbes tendres de leur champs ou les vaches n’avaient pas accès à cause de leurs bouses, pour avoir du linge resplendissant de blancheur.

     

     A suivre...

     

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